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gouverneur de Port-Tarascon, expédiait ainsi de Marseille vers la terre promise. Les deux fois, même dépêche, même enthousiasme, même rayonnement du duc. Le Lucifer, malheureusement, n’avait pas encore dépassé l’entrée de l’isthme de Suez. Arrêté là par un accident, son arbre de couche cassé, ce vieux vapeur acheté d’occasion devait attendre d’être rallié et secouru par la Farandole pour continuer sa route.

Cet accident, qui aurait pu sembler de mauvais augure, ne refroidissait en rien l’enthousiasme colonisateur des Tarasconnais. Il est vrai qu’à bord de ce premier navire ne se trouvait que la rafataille ; vous savez, les gens du commun, ceux qu’on envoie toujours en avant-garde.

Sur la Farandole, de la rafataille encore, mêlée de quelques cerveaux brûlés, tels que le notaire Cambalalette, cadastreur de la colonie.

Le pharmacien Bézuquet, homme paisible malgré ses formidables moustaches, aimant ses aises, craignant le chaud et le froid, peu porté aux aventures lointaines et périlleuses, avait longtemps résisté avant de consentir à s’embarquer.