Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/269

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et faisait sa cour à lady Plantagenet avec autant d’empressement et de grâce que si le commodore eût été à cent lieues de là. Milady, de son côté, ne cachait pas sa sympathie pour le héros et le regardait avec des yeux tendres, des yeux extraordinaires.

« Les malheureux ! Le mari va tout voir, » se disait à chaque instant Pascalon.

Eh bien, non, le mari ne voyait rien, et semblait lui aussi prendre un plaisir extrême aux récits du grand Tarasconnais.

Sur un désir de lady William, Tartarin conta l’histoire de la Tarasque, sainte Marthe et son ruban bleu ; il parla de son peuple, dit la race tarasconnaise, ses traditions, son exode ; puis il exposa son gouvernement, ses projets, ses réformes, le nouveau code qu’il préparait. Un code, par exemple, c’était bien la première fois qu’il lui arrivait d’en parler, même à Pascalon ; mais sait-on jamais tout ce que roulent ces vastes cervelles de conducteurs de peuples !

Il fut profond, il fut gai, il chanta des airs du pays, Jean de Tarascon pris par les corsaires, ses amours avec la fille du sultan.

Penché vers lady William, de quel vibrant