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La chaloupe mise en état, réparée, approvisionnée, ornée à l’avant de la couleuvrine servie par le Père Bataillet et son sacristain Galoffre, vingt miliciens bien armés embarquèrent sous les ordres d’Excourbaniès et du marquis des Espazettes, et un matin on prit la mer.

Leur absence dura trois jours, qui parurent bien longs à la colonie. Puis, vers la fin du troisième jour, un coup de couleuvrine entendu au large amena tout le monde sur le rivage, et l’on vit arriver la chaloupe, ses voiles dehors, l’avant relevé, d’une allure rapide, comme poussée par un vent de triomphe.

Avant même qu’elle eût atteint la plage, les cris joyeux de ceux qui la montaient, le « fén dé brut » d’Excourbaniès, annonçaient de loin le succès complet de l’expédition.

On avait tiré une vengeance éclatante des cannibales, brûlé des tas de villages, tué au dire de chacun des milliers de Papouas. Le chiffre variait, mais toujours énorme ; les récits aussi différaient ; le certain, c’est qu’on ramenait cinq ou six prisonniers de marque, parmi lesquels le roi Négonko lui-même et sa fille Likiriki, conduits au Gouvernement