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du Midi. Ici, remplis et fléchissants, les sacs de farinette en poudre d’or, les pois chiches gros et durs comme des chevrotines, les châtaignes blanquettes, toutes ridées et poussiéreuses, ressemblant à de petites faces de vieilles bûcheronnes, les jarres d’olives vertes, noires, confites, à la picholine, les estagnons d’huile rousse à goût de fruit, les barils de confitures d’Apt faites de cosses de melons, de cédrats, de figues, de coings, tout le détritus d’un marché tombé dans la mélasse. Là-haut, sur des rayons, parmi les salaisons, les conserves aux mille flacons, aux mille boîtes de fer-blanc, les friandises spéciales à chaque ville, les coques et les barquettes de Nîmes, le nougat de Montélimar, les canissons et les biscottes d’Aix, enveloppes dorées, étiquetées, paraphées.   Puis les primeurs, un déballage de verger méridional sans ombre, où les fruits dans des verdures grêles ont des facticités de pierreries, les fermes jujubes d’un beau vernis d’acajou neuf à côté des pâles azeroles, des figues de toutes variétés, des limons doux, des poivrons verts ou écarlates, des melons ballonnés, des gros oignons à pulpes de fleurs, les raisins muscats aux grains allongés et transparents où tremble la chair comme le vin dans une outre, les régimes de bananes zébrées de noir et de jaune, des écroulements d’oranges, de grenades aux tons mordorés, boulets de cuivre rouge à la mèche d’étoupe serrée dans une petite couronne en cimier. Enfin, partout aux murs, aux plafonds, des deux côtés de la porte, dans un enchevêtrement de palmes brûlées, des chapelets