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porte du cabinet qui s’ouvre enfin brutalement.

— Ce n’est pas ma protégée, c’est la vôtre.

Le gros Cadaillac sort sur ce mot, traverse l’antichambre à pas furieux, se croisant avec l’huissier qui s’avance entre deux haies de recommandations :

— Vous n’avez qu’à donner mon nom.

— Qu’il sache seulement que je suis là.

— Dites-y que c’est Cabantous.

L’autre n’écoute personne, marche, très grave, quelques cartes de visite à la main, et, derrière lui, la porte qu’il laisse entr’ouverte montre le cabinet ministériel, plein du jour de ses trois fenêtres sur le jardin, tout un panneau couvert par le manteau doublé d’hermine de M. de Fontanes peint en pied.

Avec un peu d’étonnement sur sa figure cadavérique, l’huissier revient et appelle :

— Monsieur Valmajour.

Le musicien n’est pas étonné, lui, de passer ainsi avant tous les autres.

Depuis le matin il a son portrait affiché sur les murs de Paris. C’est un personnage à présent, et le ministre ne le ferait plus languir dans les courants d’air d’une gare. Fat, souriant, le voilà planté au milieu du somptueux cabinet où des secrétaires sont en train de mettre à bas cartons et tiroirs dans une recherche effarée. Roumestan, furieux, tonne, gronde, les mains dans ses poches :

« Mais enfin, ces papiers, qué diable !… On les a donc perdus, les papiers de ce pilote… Vraiment, messieurs, il y a ici un désordre… »