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XI

UNE VILLE D’EAUX


Arvillard-les-Bains, 2 août 76.

C’est bien curieux, va, l’endroit d’où je t’écris. Imagine une salle carrée, très haute, dallée, stuquée, sonore, où le jour de deux grandes fenêtres est voilé de rideaux bleus jusqu’aux derniers carreaux, obscurci encore par une sorte de buée flottante, à goût de soufre, qui colle aux habits, ternit les bijoux d’or ; là-dedans, des gens assis contre les murs sur des bancs, des chaises, des tabourets, autour de petites tables, des gens qui regardent leur montre à toute minute, se lèvent, sortent pour céder la place à d’autres, laissant voir chaque fois par la porte entr’ouverte la foule des baigneurs, circulant dans le clair vestibule, et le tablier blanc flottant des femmes de service qui se hâlent. Pas de bruit, malgré tout ce mouvement, un continuel murmure de conversations à voix basse, de journaux