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L’ARLÉSIENNE.

L’homme ajouta :

— … La maîtresse et Cadet qui reviennent de la messe. Ils y vont tous les jours, depuis que l’enfant s’est tué… Ah ! monsieur, quelle désolation !… Le père porte encore les habits du mort ; on ne peut pas les lui faire quitter… Dia ! hue ! la bête !

La charrette s’ébranla pour partir. Moi, qui voulais en savoir plus long, je demandai au voiturier de monter à côté de lui, et c’est là-haut, dans le foin, que j’appris toute cette navrante histoire…




Il s’appelait Jan. C’était un admirable paysan de vingt ans, sage comme une fille, solide et le visage ouvert. Comme il était très beau, les femmes le regardaient ; mais lui n’en avait qu’une en tête, — une petite Arlésienne, toute en velours et en dentelles, qu’il avait rencontrée sur la Lice d’Arles, une fois. — Au mas, on ne vit pas d’abord cette liaison avec plaisir. La fille passait