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L’ÉLIXIR DU RÉVÉRAND PÈRE GAUCHER.

C’est le chapitre qui ne riait plus.

— Mais, malheureux, vous nous ruinez ! criait l’argentier en agitant son grand-livre.

— Préférez-vous que je me damne ?

Pour lors, le prieur se leva.

— Mes Révérends, dit-il en étendant sa belle main blanche où luisait l’anneau pastoral, il y a moyen de tout arranger… C’est le soir, n’est-ce pas, mon cher fils, que le démon vous tente ?…

— Oui, monsieur le prieur, régulièrement tous les soirs… Aussi, maintenant, quand je vois arriver la nuit, j’en ai, sauf votre respect, les sueurs qui me prennent, comme l’âne de Capitou quand il voyait venir le bât.

— Eh bien ! rassurez-vous… Dorénavant, tous les soirs, à l’office, nous réciterons à votre intention l’oraison de saint Augustin, à laquelle l’indulgence plénière est attachée… Avec cela, quoi qu’il arrive, vous êtes à couvert… C’est l’absolution pendant le péché.

— Oh bien ! alors, merci, monsieur le prieur !