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« LE DRAME DE JULES SOURY »

En tête de son numéro du 1er février courant, la Revue UNIVERSELLE — qui tient la tête de la pensée française contemporaine — publie un article de M. Camille Vettard, intitulé Le Drame de Jules Soury. C’était, en effet, un personnage extraordinaire que le savant physiologiste, admirateur du dogme catholique et de l’Eglise romaine, dépouillé de toute foi, et qui porta dans la lutte contre la mystification de l’innocence de Dreyfus, un esprit résolu, pénétrant, inébranlable. Avec cela il croyait à la science et il écrivit, sur les fonctions du cerveau, un gros ouvrage en deux volumes, conforme aux visions baroques de l’époque (1900) et dont il ne subsiste exactement rien. Chose d’autant plus émouvante que le bon Brissaud, le père du rôle du « faisceau pyramidal » et autres fariboles aujourd’hui anéanties, était un maniaque du « bordereau » et chapitrait, à ce sujet, ses clients. Un soir, le général Mercier, vers les minuit, entendit sonner à sa porte. C’est de ce grand homme que je tiens ce récit. Il alla ouvrir et vit un petit bonhomme, assez râblé, avec un front énorme, qui avait sous le bras deux forts volumes qu’il lui tendit. Le visiteur, respectueusement, salua et sortit. C’était Jules Soury chargé de son ouvrage sur les fonctions, totalement ignorées, alors comme aujourd’hui, du cerveau humain.