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nouvelle épouse égayera mon foyer et va suffire, — toute mignonne qu’est mon Éveline, — à remplir de liesse et d’amour cette maison sombre et dévastée comme une ruine, ce cœur plus sombre encore et plus dévasté. Mon Dieu, vous savez quel excellent mari je puis faire et les trésors d’affection que je tiens enfouis là dedans ; — vous savez que j’ai lutté de toutes mes forces avant de céder aux dures lois de ma destinée. Sept fois vous avez vu la sueur de sang qui couvrait mon visage ; — sept fois vous avez vu mes larmes couler et mes pauvres mains trembler, en étranglant toutes ces belles créatures. Seigneur, Seigneur, m’avez-vous pardonné et dois-je considérer comme un gage de miséricorde l’union que je contracte aujourd’hui avec mon cher petit Évelinon ? — S’il en est ainsi, mon Dieu, — je jure par les pieds divins du grand crucifié que mes lèvres ne frôleront pas les cheveux de ma femme avant mon retour de la ville sainte, où je vais me purifier de mes crimes entre les mains de votre vicaire bien-aimé. — J’ai dit. (Il se couvre et frappe sur un timbre.) Holà, sœur Anne ! (Entre sœur Anne.)

sœur anne

Me voici, mon frère.

barbe-bleue

Fourbissez ma cuirasse sur l’heure, et visitez les