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XXIV
à bordighera

Comme l’avait dit M. Joyeuse chez le juge d’instruction, Paul de Géry revenait de Tunis après trois semaines d’absence. Trois interminables semaines passées à se débattre au milieu d’intrigues, de trames ourdies sournoisement par la haine puissante des Hemerlingue, à errer de salle en salle, de ministère en ministère, à travers cette immense résidence du Bardo qui réunit dans la même enceinte farouche hérissée de couleuvrines tous les services de l’État, placés sous la surveillance du maître comme ses écuries et son harem. Dès son arrivée là-bas. Paul avait appris que la chambre de justice commençait à instruire secrètement le procès de Jansoulet, procès dérisoire, perdu par avance ; et les comptoirs du Nabab fermés sur le quai de la Marine, les scellés apposés sur ses coffres, ses navires solidement amarrés à la Goulette, une garde de chaouchs autour de ses palais annonçaient déjà une sorte de mort civile, de succession ouverte dont il ne resterait plus bientôt qu’à se partager les dépouilles.

Pas un défenseur, pas un ami dans cette meute vorace ; la colonie franque elle-même paraissait satis-