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fortifièrent les résolutions des prisonniers. Finalement, ils décidèrent de s’enfuir si l’Empereur, à l’occasion de son couronnement, ne les mettait pas en liberté. Le couronnement eut lieu sans réaliser leur espoir. Alors, leur parti fut pris. C’était le 10 janvier 1805.

Le même soir, ils commencèrent à percer le mur de leur casemate en un endroit où existaient les traces d’une ancienne ouverture. Pour opérer ce travail, ils ne possédaient d’autres outils qu’une paire de pincettes et un petit ciseau de menuisier dont Girod se servait pour découper du carton. Malgré l’insuffisance de ces moyens, ils parvinrent, dès cette première nuit, à faire sauter un certain nombre de pierres. À l’approche du jour, ils les remirent en place tant bien que mal, en les enduisant d’un mortier sur lequel, pour en dissimuler la fraîcheur, ils répandirent de la poussière. Quant aux débris de la démolition, ils les cachèrent au fond de leurs lits. L’ouvrage était si habilement fait que les geôliers n’y virent rien.

La nuit suivante, le percement du mur fut achevé. Par le trou qu’ils venaient de faire, ils se glissèrent tour à tour et se trouvèrent alors dans une casemate voisine de la leur et sans ouverture apparente. En tâtant les murailles, ils découvrirent une embrasure de canon remaçonnée. Ils acquirent ainsi la preuve qu’ils touchaient au mur extérieur du fort. En cet endroit, ils trouvèrent une barre de fer qui devint entre leurs mains un outil plus efficace que ceux dont ils s’étaient d’abord servis. Les décombres cachés dans leurs lits furent transportés dans la casemate ; ils y déposèrent aussi leurs instruments et, comme la veille, ils rebouchèrent l’ouverture. Désormais, à la condition de n’être pas trahis ou surpris, ils étaient sûrs d’arriver au dehors, en pratiquant une brèche dans la muraille. Ils firent