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fiance. Ils luttèrent en commun pour la même cause jusqu’à la fin de 1799.

À cette époque, la paix fut conclue entre les chouans et le gouvernement consulaire. Après la mort de son général, fusillé, comme on sait, au mépris des traités, le 21 février 1800, Moulin déposa les armes, rentra dans son village, et s’y maria. Bientôt après, il retournait à son ancien état de fabricant de faux. Il ne rêvait plus que de vivre en repos et de se consacrer à sa famille.

Mais si correcte que fût sa conduite, il s’était trop gravement compromis dans le passé pour que la police ne fût pas toujours tentée de voir en lui un suspect qu’il importait de surveiller sans relâche. Quand éclata la conspiration de Georges, l’histoire de Moulin fut celle de la plupart des chouans. Bien qu’il n’eût point participé à ce complot, il fut arrêté, arraché à sa femme et à ses enfants et quoique aucun jugement ne l’eût condamné, il fut conduit d’étape en étape, par les gendarmes, jusqu’au fort de Joux où précédemment Suzannet et d’Andigné avaient été enfermés et que Bonaparte lui assignait pour prison.

À son arrivée, il s’y trouva en assez nombreuse compagnie. Depuis quelques jours, sur toute l’étendue du territoire, les prisons se remplissaient d’anciens conspirateurs subitement redevenus suspects. Le fort de Joux, pour sa part, en avait reçu dix-sept. Mais, sans doute, les charges qui pesaient sur la plupart d’entre eux n’étaient pas bien graves, puisqu’au bout de quelques semaines de détention, on en mit douze en liberté. Au 1er janvier 1805, il n’en restait plus que cinq : le marquis de Rivière, Charles de Frotté, frère de Louis, Allier d’Hauteroche, un Anglais nommé Girod, qui avait combattu sous les ordres de Bourmont, et enfin Michelot-Moulin.