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Desmarets. Soudain, par des procédés restés ignorés, il trouve un protecteur bien inattendu dans la personne du général Duroc, chef de la police militaire des Tuileries. Grâce à celui-ci, il rentre en grâce auprès de Desmarets, et, de nouveau, il est employé. Je me suis étendu sur l’histoire de La Morlière parce que, aux menus détails près, elle est celle de la plupart des espions de ce temps, tous anciens émigrés ou anciens chouans tombés dans la misère et cherchant à faire argent de leurs fréquentations passées.

À Gap, La Morlière avait connu un certain abbé Rougier, membre du Comité royaliste de la région lyonnaise, qui, séduit par sa faconde de Provençal, crut voir en lui un ennemi de la Révolution, bon à employer pour la combattre et lui fit des confidences. La Morlière n’eut rien de plus pressé que de les répéter à Desmarets. L’abbé Rougier fut arrêté à Gap, ordre donné de l’expédier à Paris sous bonne escorte. Mais, en route, les gendarmes qui le conduisaient, et parmi lesquels se trouvait un chef d’escadron, furent attaqués par une bande d’hommes masqués qui délivra le prisonnier. Durant plusieurs mois, on n’entendit plus parler de celui-ci. Un jour, le chef d’escadron, tombé en disgrâce, se trouve nez à nez avec lui. Il le reconnaît et, invoquant le mandat d’arrêt non exécuté, il allait le faire incarcérer, quand l’abbé tira de sa poche et présenta aux agents un second mandat signé du préfet de police Dubois qui annulait le premier. Ainsi se découvrit que, pour se tirer de peine, l’abbé Rougier n’avait pas hésité à offrir ses services au gouvernement. En 1813, il était curé aux environs de Lyon. Quant à La Morlière, depuis longtemps il avait disparu, la police le jugeant incapable.

D’ailleurs, toutes ces histoires sont obscures, envi-