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V

C’est en ces circonstances que Desmarets présenta à Fouché un jeune Breton, nommé Duchatellier, ayant servi dans la chouannerie, en relations, déclara-t-il, avec les émissaires de Georges, venus à Paris, et qui, fréquemment employé par eux, s’offrait pour révéler leurs secrets et aider à prendre leur chef ou l’assassiner. En ces temps où l’espionnage et la trahison s’exerçaient sans relâche dans tous les partis, des offres de ce genre étaient fréquentes. Entre les lettres qui le démontrent, je cite au hasard celle-ci : « Citoyen ministre, j’apprends que Georges continue son brigandage à l’aide des guinées d’Angleterre. Je peux coopérer à la prise de ce chef et je vous offre mes services. Je ne veux point de récompense qui m’avilirait. Si vous voulez me donner un moment d’audience, je vous exposerai mon projet. Mais je désire que l’heure que vous m’indiquerez ne soit pas celle de vos bureaux. Je ne veux parler et n’agir que par vous seul. Le secret le plus impénétrable peut seul assurer la réussite de mon entreprise. » Ces propositions affectaient ordinairement une forme désintéressée et mystérieuse. Le plus souvent, du reste, elles étaient sans consistance et ne constituaient pour ceux qui les faisaient qu’un moyen d’arriver à Fouché et de solliciter ses faveurs.

Celles de Duchatellier parurent plus sérieuses. Elles furent écoutées et acceptées. Autant qu’on en peut juger d’après les rares documents relatifs à cette affaire, il fut convenu que Duchatellier serait accrédité auprès du