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épurer, se cantonne dans les affaires administratives et municipales, et laisse la police politique à Rovigo et à ses agents. Parmi ceux-ci, il faut encore mentionner Desmarets, jadis volontaire de la République, et, depuis, entrepreneur du service des vivres à l’armée des Alpes. En 1799, on l’a placé à la tête du bureau de la haute police. À ce titre, il est le subordonné du ministre. Sa vraie mission consiste à exercer sur lui un espionnage incessant.

Fouché et Rovigo, Réal et Desmarets, et, au-dessous d’eux, Dubois, Veyrat un ancien horloger, Mengaud, voilà en réalité les véritables maîtres de la France sous l’Empire, ceux qui disposent du repos et de l’honneur des citoyens. Le maréchal Moncey, inspecteur général de la gendarmerie, le général Duroc, chargé de veiller à la sûreté de l’Empereur, les secondent en tous leurs actes, même quand ils les blâment et s’en plaignent. Avec une telle organisation de police, Napoléon peut se défendre. Elle se justifie même par la nécessité où il est de se défendre. Quand elle engendre la violence, l’iniquité, l’arbitraire, la faute en est, non à l’instrument, mais à ceux qui le manient.

Le plus efficace moyen de toute bonne police, c’est l’espionnage. En cet art, les hommes que je viens de nommer n’ont rien à apprendre, Fouché surtout. Il appartient à un temps où l’espionnage, la délation, la trahison ont été élevés à la hauteur d’un principe de gouvernement et où espions, délateurs et traîtres sont innombrables. Les Bourbons ont des agents secrets à Paris, comme le Directoire d’abord, l’Empire ensuite, en ont auprès d’eux. Il y a, des deux côtés, assaut de combinaisons ingénieuses pour surprendre les secrets et les projets de l’adversaire. Elle est longue la liste des hommes qui cherchent à s’enrichir à ce métier. Les