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explique la puissante organisation qu’il a dû donner à sa police et le rôle qu’elle a joué pendant toute la durée de son règne.


II

Cette police avait déjà fonctionné sous le Directoire, avec Fouché pour chef. En arrivant au pouvoir, Napoléon en trouve donc les éléments réunis et les premiers rouages en mouvement. Il se les approprie, les coordonne, les améliore, et bientôt, grâce à lui, la machine, rajeunie et remise à neuf, fonctionne. Fouché continue à la diriger. Napoléon l’a voulu ainsi. Cet homme qu’il méprise sort du parti jacobin. En s’assurant son concours, le premier Consul donne un gage à ce parti et, par le plus intrigant de ses membres, reste en rapports avec lui.

Fouché est trop connu pour qu’il y ait lieu de s’attarder à pénétrer en cette âme ténébreuse. « Il avait, écrit Pasquier qui l’a bien connu, un art incomparable pour faire des dupes et il n’a jamais exercé cet art avec plus de cynisme que sur les émigrés et les royalistes. » Moi-même, j’ai dit en en parlant : « Ce n’était pas un mauvais homme. Les historiens qui se sont occupés de lui le représentent avec raison comme plus volontiers reconnaissant que vindicatif. Soit qu’en effet il inclinât par tempérament ou par habileté, vers la modération, toutes les fois que son ambition n’était pas en jeu, soit que, prévoyant déjà la chute de Napoléon, il voulût se créer des titres à la reconnaissance de ses successeurs, on cite des cas où il tenta d’atténuer la rigueur des