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l’Ouest. Grâce aux renseignements qu’il tenait de ses généraux et de sa police, il savait que les insurgés, dépourvus de toutes ressources, n’étaient pas redoutables. Mais pour les empêcher de le devenir il s’était vu contraint d’envoyer contre eux une petite armée. Au moment de s’engager dans une guerre extérieure dont sa couronne à peine reconquise était l’enjeu, il s’impatientait du péril que créait cette insurrection et de la nécessité qu’elle imposait de laisser en Vendée douze mille hommes qui lui eussent été si précieux dans la campagne qu’il allait entreprendre contre les alliés.

De ces circonstances examinées et observées avec le soin qu’il apportait en toutes choses, Fouché, rappelé depuis quelques semaines au ministère de la Police, tira l’idée du stratagème auquel nous allons le voir recourir pour obliger les chouans à déposer volontairement les armes. Qui voulait-il servir en mettant à exécution ce projet ? Napoléon ou Louis XVIII ? Probablement ni l’un ni l’autre. Il n’aimait pas le roi et il ne croyait pas à la durée du pouvoir impérial ressuscité.

– Toute l’Europe va lui tomber sur le corps, disait-il à M. Pasquier en lui parlant de Napoléon ; il est impossible qu’il résiste ; son affaire sera faite avant quatre mois.

C’est donc surtout pour lui-même qu’il travaillait en entreprenant d’arrêter la guerre civile en Vendée. En prévision de la chute de l’Empereur et du retour du roi, il voulait se créer des titres à la bienveillance de celui-ci, se trouver en place au moment de sa rentrée et plus heureux qu’en 1814 devenir l’arbitre des résolutions qu’auraient à prendre, de concert ou contradictoirement, Louis XVIII et les alliés. Toute sa conduite durant les Cent-Jours s’inspira de ces désirs dont il ne pouvait d’ailleurs poursuivre la réalisation qu’avec une