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route de la Malmaison, que trois ans plus tard, Georges lui-même, avec Moreau et Pichegru pour complices, viendra tenter à Paris.

La police est sur les dents. À toute heure, elle est prévenue par des avis mystérieux que Bonaparte est sous le coup des plus pressants dangers. Chaque jour, elle procède à l’arrestation des chouans désignés comme les plus turbulents. Ces mesures ne ralentissent pas les menées des conspirateurs. On ne parle que de complots. On y mêle les noms des plus hauts personnages qu’on dit vendus aux royalistes, prêts à s’unir à eux, à un signal donné, pour renverser le gouvernement consulaire hors d’état, à ce qu’on assure, de se défendre contre un coup de main, par suite de l’infériorité numérique et du mauvais esprit de la garnison de Paris.

De toutes parts règnent la défiance et l’inquiétude. Bourmont lui-même n’est pas à l’abri du soupçon. Tandis que les royalistes, encore qu’à toute heure il mette son crédit à leur service, lui reprochent la faveur dont il jouit, son mariage célébré en semaine sainte, au mépris des lois de l’Église, ses rapports avec Fouché, Bonaparte de son côté l’accuse de se consacrer toujours à la cause royaliste, d’être resté l’ami, peut-être le complice des chouans, de les protéger et même de prévenir ceux d’entre eux dont l’arrestation a été décidée.

Les griefs du premier Consul de plus en plus se fortifient par mille traits que signale la police : les voyages de Bourmont dans l’Anjou, les achats de chevaux auxquels il se livre, les propos qu’il tient et les envois de fonds qui lui sont faits d’Angleterre. Il le mande aux Tuileries, l’interroge, la menace à la bouche.

Vainement, Bourmont déclare que l’or anglais qu’il a reçu était destiné à acquitter les engagements qu’au moment de la pacification il a contractés envers ses