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que la police en eût pénétré le mystère, elles lui prouvèrent que Prijent était revenu en France, qu’il y tramait de nouveaux complots. En attendant qu’on pût s’emparer de lui, il importait, pour y parvenir, de rechercher ses complices. On s’occupa d’abord des destinataires des deux lettres, Mme  de Jarnac et Mme  de Fortia. Le lieutenant Caignou fut chargé de se rendre auprès d’elles afin de les interroger et de présenter à la seconde la traite Campremont. La comtesse de Jarnac avoua que son mari lui faisait tenir de ses nouvelles par le comte de Puisaye. Ce dernier expédiait des lettres à Prijent par la correspondance de Jersey. Prijent les mettait à la poste. Quant à Mme  de Fortia, sur le vu de la traite, elle affirma qu’elle avait déjà payé.

Le sieur de Campremont, signataire de cette traite, n’était autre, à ce qu’elle ajouta, que Mgr de Bethisy, ancien évêque d’Uzès, émigré qui résidait à Londres. Les fonds récoltés par Mme  de Fortia provenaient de personnes charitables ; ils étaient destinés au vénérable prélat. Redoutant de se compromettre, elle n’avait osé les lui expédier. Elle s’était contentée de lui faire savoir qu’elle les gardait à sa disposition. Puis, un neveu de l’évêque étant venu la voir, elle les lui avait versés pour s’en débarrasser. En tout cela, rien ne parut répréhensible. Les destinataires des lettres ne furent pas inquiétées.

Au surplus, Fouché et Réal n’attachaient de prix qu’à la capture de Prijent. Du moment qu’il était en Bretagne, on devait l’y découvrir. Réal suggéra au préfet de l’Orne l’idée d’employer à cet effet le marquis de Puisaye des Joncherets. Si ce dernier voulait écrire à Prijent, lui donner un rendez-vous, il serait sans doute aisé de se saisir de l’introuvable conspirateur. Réal envoyait même de Paris le texte de la lettre qu’il s’agissait