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autour de la maison de Mme de Pontchartry, sœur de Puisaye, chez qui vivait la fille de celui-ci. Elle apprit que Mme de Pontchartry avait reçu pour sa nièce et pour elle-même des lettres de Londres. De qui pouvaient émaner ces lettres, sinon du comte de Puisaye ? On arrêtait alors les gens pour moins que cela. Mme de Pontchartry fut mandée chez le commissaire de police de son quartier et questionnée. Elle reconnut que diverses missives expédiées de Londres par son frère lui étaient parvenues à une date récente, les unes pour Mlle de Puisaye, les autres pour elle. Elle les montra. On n’y put relever une seule phrase suspecte. Mais on y découvrit la preuve qu’elle avait été chargée de faire tenir un pli à son frère aîné, le marquis de Puisaye des Joncherets, domicilié dans l’Orne, commune de La Mesnière. Ce que contenait ce pli, elle l’ignorait.

Ordre fut aussitôt envoyé au préfet d’Alençon d’arrêter le marquis et de l’interroger. Arrêter comme un malfaiteur un homme paisible, grand propriétaire, adjoint au maire de sa commune et qui, resté en France sous la Révolution, n’avait pris aucune part aux troubles antérieurs, parut au préfet chose si grave qu’il ne put s’y résoudre. Son administré méritait quelques égards. Il se contenta donc de faire partir pour le château de La Mesnière le lieutenant de gendarmerie Caignou en lui enjoignant d’y procéder à une perquisition. Caignou était l’ami du marquis. Il se fit précéder d’un avis secret à l’effet de laisser à M. de Puisaye, s’il était détenteur de pièces compromettantes, le temps de les faire disparaître. Sans attendre l’arrivée de Caignou, le vieux gentilhomme partit sur l’heure pour Alençon. Il se présenta chez le préfet. Il lui déclara que, quoiqu’il fût le tuteur de sa nièce, il était sans nouvelles de son frère depuis cinq ou six ans.