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projet d’attenter aux jours de Votre Majesté. Elle n’a pas dissimulé que, s’il n’eût été qu’un malheureux échappé à la proscription, elle se fût abstenue de révéler le lieu de sa retraite, mais que l’énormité du crime qu’il méditait ne lui permit pas d’hésiter. Elle obéissait d’ailleurs à ses sentiments particuliers de reconnaissance, Votre Majesté ayant daigné nommer son fils officier. Indépendamment de cette déclaration verbale, j’en joins une écrite de M. le sénateur de Pontécoulant, qui se trouvait à Caen à cette époque. Elle ne laisse aucun doute sur l’authenticité de ce fait. »

La marquise de Vaubadon, abandonnée et méprisée, vécut longtemps encore. Fixée définitivement à Paris, elle s’était retirée à Belleville et y mourut en 1848. Plusieurs années avant, elle avait eu la douleur de perdre son fils, chef d’escadrons de chasseurs. À ses derniers moments, il supplia ses parents de se réconcilier. Le père promit et demanda à la mère de l’aider à tenir sa promesse. Elle s’y refusa, en déclarant « que, quelles que pussent être les convictions d’une société privée, elles seraient impuissantes à comprimer les préventions gravées dans l’opinion populaire et qu’une telle mesure ne présentait d’autres chances que celles de nouveaux chagrins et de nouveaux dangers ». Elle formulait ainsi par avance le jugement que dicterait à tous les hommes impartiaux une étude consciencieuse des faits, demeurés obscurs jusqu’à ce jour, qu’à la lumière des pièces officielles et des documents inédits nous avons reconstitués dans la mesure où ils pouvaient l’être.

Ces documents inédits et ces pièces officielles n’ont-ils dit que la vérité et contiennent-ils toute la vérité ? En presque tous les points, oui, nous le croyons. Il est cependant certains traits des dramatiques aventures qu’on vient de lire dont nous n’avons pu, malgré nos efforts,