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mouvement, elle lui avoua qu’elle savait où était d’Aché, qu’elle était prête à aider la police à s’emparer de lui.

– Je ne me serais pas décidée à ce parti si cet homme n’était qu’un proscrit, dit-elle à Pontécoulant. Mais c’est un assassin. Il est décidé à attenter à la vie de l’Empereur, et je ne puis oublier les bontés qu’a prodiguées Sa Majesté à mon fils, officier dans ses armées.

Vraie ou fausse, cette allégation décida Pontécoulant. Il conduisit Mme  de Vaubadon chez Fouché et chez Réal. Là, toutes les dispositions furent prises pour organiser le piège dans lequel devait tomber d’Aché. Il a été dit pour la défense de Mme  de Vaubadon qu’elle ne s’engagea qu’à décider d’Aché à quitter la France. Mais, réduit à ces termes, le service méritait-il d’être payé au prix de la somme de soixante mille francs qui lui fut promise ? D’ailleurs, le doute, à cet égard, devient impossible, en présence de l’extrait suivant d’un rapport officiel adressé, le 6 juin 1812, à l’Empereur par le duc de Rovigo, successeur de Fouché, à l’effet de lui recommander Mme  de Vaubadon : « Votre Majesté daignera se rappeler que, sur les instances de M. le sénateur de Pontécoulant, elle consentit à faire les démarches nécessaires pour mettre d’Aché dans les mains de la police. » Il n’est donc que trop certain qu’avec le concours de Pontécoulant elle se fit l’artisan de la perte de ce malheureux.

Le 5 septembre 1809, elle vint de Bayeux à Trévières pour s’entretenir avec Mlle  de Montfiquet. Elle lui parla de d’Aché, fit un émouvant tableau des périls auxquels il s’exposait en restant en Normandie ; la police était sur ses traces, le cercle qu’elle avait tracé autour de lui allait en se resserrant de plus en plus. S’il ne se décidait à partir, il deviendrait bientôt impossible de le sauver. Quant à elle, à l’en croire, elle n’oubliait pas l’affection que jadis elle avait eue pour lui. Elle l’aimait encore