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qu’elles connaissaient la marquise de Vaubadon, entretenaient des relations avec elle et croyaient à la sincérité du dévouement qu’elle ne cessait de manifester en faveur de la cause royale. Il est vraisemblable que Mme  de Vaubadon apprit par cette voie le retour du vicomte d’Aché et qu’elle l’apprit pendant l’été de 1809, alors que, pour des causes ignorées, il était rentré secrètement à Trévières, supposant, sans doute, qu’on ne viendrait plus l’y chercher, et peut-être avec l’espoir de repasser en Angleterre. Avertie de sa présence chez les Montfiquet, elle résolut d’en tirer parti pour gagner les bonnes grâces du gouvernement impérial, et le dénoncer.

La duchesse d’Abrantès, dans le récit romanesque et sans consistance qu’en ses Mémoires elle a consacré à la mort de d’Aché, donne à entendre que Mme  de Vaubadon ne fut entraînée à le livrer que par le désir de se venger d’avoir été abandonnée et trahie pour Henriette de Montfiquet. C’est un conte à dormir debout. Henriette de Montfiquet, laide et très pieuse, n’était pas la maîtresse de d’Aché. L’eût-elle été, que Mme  de Vaubadon avait perdu le droit d’en concevoir un ressentiment. Après le départ du vicomte d’Aché, elle avait eu d’autres amants, entre autres le chevalier de Bruslart, qui venait d’arriver en France avec une mission de Louis XVIII, et résidait aux environs de Bayeux, sans que la police eût pu mettre la main sur lui. Encore à cette heure, l’inconstante marquise vivait avec un certain comte d’Ollendon, fort triste personnage, vendu à Fouché et à Réal, comme d’ailleurs la plupart de ces anciens insurgés à qui l’habitude des aventures avait inculqué le dégoût de toute discipline morale, de toute existence régulière et qu’elle n’avait que trop rendus propres aux plus viles actions. Le projet de livrer d’Aché pour en faire argent fut-il suggéré à l’amant par la maîtresse,