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– La sauver ! comment ?

– Écrivez au patron Delaistre. Demandez-lui d’aller la chercher à Caen et de la conduire en Angleterre. C’est un homme de cœur. Il ne vous refusera pas ce service.

Convaincue de la sincérité de Liquet, la marquise, dans l’élan de sa reconnaissance, exigea qu’il acceptât douze mille francs en billets de banque, que, depuis le commencement de sa détention, elle portait sur elle, cachés sous ses vêtements. Liquet se fit prier, finit par accepter ces billets et les envoya au préfet. Quant à la lettre, il la remit à Delaistre au moment où ce dernier partait pour Caen, afin de s’y trouver à la date qu’il avait fixée à Chauvel.

Mme  Aquet de Férolles, bien que ne pouvant plus mettre en doute l’étendue des périls qui la menaçaient, jouissait à cette heure d’un répit momentané. Lasse à en mourir de ses fatigues et de ses angoisses, ne sachant plus où reposer sa tête, elle était revenue trouver Vanier de la Chauvinière en le suppliant de ne pas l’abandonner. Pris de pitié, l’avoué l’avait conduite chez son père, petit rentier des environs de Caen. Elle vivait là, cachée et retirée, se croyant en sûreté et ne recevant guère que Chauvel. Avertie par lui de l’arrivée prochaine de Delaistre, elle n’abandonna sa retraite qu’à regret pour se rendre à Caen.

Delaistre avait donné rendez-vous à Chauvel à l’auberge du Parc, faubourg Vaucelles. Ils s’y rencontrèrent dans la matinée du 3 octobre. Mme  Aquet de Férolles attendait dans la rue en compagnie de Lanjalley et de Vanier de la Chauvinière. Ils allèrent tous ensemble chez un traiteur pour y lire à l’aise la lettre de Mme  de Combray. Quand elle en eut pris connaissance, Mme  Aquet de Férolles se récria. Quitter le Calvados ! Pourquoi ? Nulle part, elle ne pourrait se cacher aussi bien que là