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Marchand, ces deux bons apôtres ont imaginé de se servir d’elle pour obtenir de Joseph Buquet la restitution des fonds volés. Cette préoccupation se trahit dès les premières conversations. Vanier de la Chauvinière prêche misère, et se plaint. Il a, dit-il, contracté des dettes pour payer celles de Le Chevallier.

– Mais vous avez reçu huit mille francs, objecte Mme Aquet de Férolles. Moi je n’ai rien eu, et mes biens sont sous le coup d’une saisie. J’ai dû laisser protester une lettre de change.

– C’est sans importance pour vous, reprend l’avoué. Vous avez un mari ; il sera bien obligé de payer, tandis que personne ne payera pour moi.

Ainsi se révèlent leurs embarras réciproques. Après avoir consulté les amis, ils décident que Mme Aquet de Férolles ira trouver Joseph Buquet pour le mettre en demeure de s’exécuter. Chauvel s’offre à l’accompagner. Il est tout prêt à feindre d’arrêter Buquet ou même à lui « f… un coup de fusil ».

– Pas de violence, observe prudemment Lanjalley. Contentez-vous de lui dresser un procès-verbal de rébellion.

Mais on a affaire à forte partie. Buquet sait à quoi s’en tenir. Il sait qu’il n’a rien à craindre de Chauvel. Aux menaces du brigadier, il répond avec la rouerie d’un Normand cupide et madré. Il pleure et proteste de son bon vouloir. Il a si bien caché l’argent qu’il ne peut le retrouver. Il faut un long débat pour lui arracher quelques écus. Mme Aquet de Férolles est bien heureuse de revenir avec cent soixante francs. Déçus dans leurs espérances, Vanier de la Chauvinière et Bureau de Placène obligent Mme Aquet de Férolles à retourner chez Buquet. Seulement, cette fois, elle sera accompagnée d’un homme énergique, résolu et qui n’a rien à craindre : le général