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Faites-en bon usage. L’envoi d’autres secours en dépend. » À la fin de cette lettre, toute pleine d’heureuses nouvelles, apparaît ce post-scriptum douloureux : « À propos, savez-vous combien on trouve pour votre bague ? Dix à quinze schellings. Jugez de la véracité de l’ami Pancemont. Mais jugez aussi de notre embarras ! »

À quelques jours de là, La Haye Saint-Hilaire ayant demandé qu’en attendant les effectifs anglais on lui envoyât quelques émigrés pour le seconder, l’abbé Guillevic écrivait encore : « Ah ! mon ami, vous ne savez pas ce que vous demandez en sollicitant le retour de vos camarades. L’oisiveté les a perdus, en général, et vous vous préparez bien des chagrins. Ils ne vous pardonneront pas tout le bien que vous avez fait et voulu faire sans eux. » Autant dire au malheureux chouan qu’il ne devait plus compter que sur lui-même.

À supposer qu’il en fût convaincu, ce dont on peut douter, toute sa conduite témoignait du contraire. À ce moment encore, il lui eût été possible de passer à Londres par l’une des barques qui lui apportaient ces lettres, tour à tour enthousiastes et décourageantes. Mais il s’obstinait à rester en Bretagne et à braver, avec une témérité sans exemple, les forces réunies contre lui. On croit rêver en constatant que, dans un pays où tout le monde le connaissait et qu’à toute heure sillonnaient en tous sens les troupes du général Boyer, il tint la campagne pendant plus d’une année. Un tel prodige eût été impossible, si, parmi les populations au milieu desquelles il vivait, il n’eût trouvé d’innombrables complices. Toutefois, son odyssée touchait à son terme.

Dans la matinée du 23 septembre 1807, le général Paillard, commandant le Morbihan, fut averti par un espion que La Haye Saint-Hilaire était attendu le même jour, avec Pourchasse et Billy, aux environs de Vannes, chez