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dans la commune de Sulniac ne sont pas rendus sous huit heures à dater de ce moment, au village de Lange, paroisse de Saint-Jean, M. l’évêque et celui qui l’accompagne seront fusillés ; et si les gendarmes se présentent pour marcher à la défense de ceux que nous arrêtons, ces derniers perdront la vie. » Mgr de Pancemont achevait à peine la lecture de cette laconique mise en demeure que La Haye Saint-Hilaire l’interpella :

– Vous avez lu, Monsieur ; eh bien, descendez.

Comme l’évêque essayait de parlementer, il le tira brutalement de la voiture, ainsi que les deux prêtres qui voyageaient avec lui. Une fois sur la route, et tandis que l’un des bandits menaçait monseigneur d’un pistolet, les autres lui arrachaient sa soutane et son chapeau, ordonnaient au cocher de quitter sa livrée dont ils voulaient revêtir leur victime.

Pendant que s’opérait ce changement, se présenta le maire de Monterblanc, suivi de quelques notabilités de la commune. Ils venaient au-devant du prélat pour lui indiquer la route. Avant d’avoir pu comprendre qu’il était tombé dans un guet-apens, ils reçurent l’ordre de déguerpir, ce qu’ils firent sur-le-champ, mais non sans que le maire eût été contraint de donner son gilet et son chapeau. De son côté, l’abbé Jarry, ayant déclaré qu’il n’abandonnerait pas son évêque, recevait l’ordre de quitter sa soutane et de prendre l’habit du domestique Thétiot. Quant à l’abbé Allain, on le fit monter en voiture en lui disant :

– Si vous aimez votre évêque, hâtez-vous d’aller trouver le préfet, crevez ces deux rosses s’il le faut, et souvenez-vous que sous huit heures, si nous n’avons satisfaction, nos otages périront.

Le grand vicaire parti, Mgr de Pancemont fut