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pastorale pour donner la confirmation dans les paroisses de son diocèse, les mécontents répondaient :

– C’est nous qui la lui donnerons.

À cette situation, qui s’aggravait de jour en jour, les autorités ne pouvaient rien. Elles n’eussent pu la faire cesser qu’en s’emparant de La Haye Saint-Hilaire et de ses complices. Mais ceux-ci demeuraient introuvables, encore qu’à toute minute, leur audace se manifestât par les traits les plus imprévus. C’est ainsi que l’évêque reçut un jour de La Haye Saint-Hilaire une lettre lui réclamant vingt-quatre mille francs destinés aux royalistes bretons et qu’ils l’accusaient à tort d’avoir employés à son usage personnel. « Le général Georges vous les a déjà réclamés, disait cette lettre, vous ne lui avez pas répondu. Si vous faites de même avec moi, il vous en cuira. » La requête étant restée sans réponse, La Haye Saint-Hilaire vint en personne la présenter.

Pendant un grand dîner qui avait lieu à l’évêché, il osa pénétrer dans le palais épiscopal, jusqu’au cabinet de Mgr de Pancemont qu’il fit demander sous prétexte d’affaire urgente et qui vint en effet le rejoindre. Les détails manquent sur la scène qui eut lieu entre l’évêque et le redoutable chouan. On n’en sait que le dénouement par la tradition locale. Lorsque, l’entretien terminé, La Haye Saint-Hilaire voulut se retirer, il exigea que son interlocuteur se couchât à plat ventre et demeurât dans cette position jusqu’à ce que lui-même eût disparu.

Ceci se passait dans le courant du mois de juillet, quelques semaines après l’arrivée de La Haye Saint-Hilaire en Bretagne. Dans la nuit du 23 au 24 du même mois, deux de ses compagnons, Pourchasse et Bertin, se trouvant dans un cabaret du canton de Sulniac, une