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tage d’éclaircir bien des faits dont les causes sont restées obscures, ne serait-ce que l’impitoyable rigueur avec laquelle Napoléon traita, non seulement les rebelles déclarés, mais encore les suspects. Si, sous son règne, les prisons ne cessèrent d’être pleines d’émigrés et de chouans, c’est qu’il savait que presque tous n’eussent profité de leur mise en liberté que pour aller grossir les rangs des conspirateurs. Si les plus téméraires de ceux-ci tombèrent sous les balles des pelotons d’exécution ou montèrent à l’échafaud, c’est que, pour empêcher l’esprit de rébellion de se propager et l’insurrection de s’étendre, il fallait des exemples.

Telle est à grands traits leur épopée. Quelque jugement qu’elle suggère, ils y apparaissent comme des géants non pas seulement les chefs dont le nom est devenu populaire, mais encore les personnages de second ordre, que j’ai cités plus haut, qui forment avec eux ce qu’on pourrait appeler le personnel des Grands Chouans, et, au-dessous d’eux, les humbles, les ignorés que nous ne connaissons que par les sobriquets qu’on leur avait donnés : Marche-à-Terre, Brise-Bleus, Va-Sans-Peur, Sans-Pitié, Cœur-de-Roi, Jambe-d’Argent, Galope-la-Frime, Brave-la-Mort.

Cette épopée se divise en deux périodes distinctes : celle des guerres que clôt la pacification de 1800