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S’ils avaient eu de quoi acheter un bateau neuf, ils auraient pu relever leur commerce ; mais on avait dépensé toutes les économies pendant les jours de maladie, et les bénéfices passaient à boucher les trous de la Belle-Nivernaise qui n’en pouvait plus.

Victor devint une lourde charge pour eux.

Ce n’était plus l’enfant de quatre ans qu’on habillait dans une vareuse et que l’on nourrissait par-dessus le marché.

Il avait douze ans, maintenant ; il mangeait comme un homme, bien qu’il fût resté maigrichon, tout en nerfs et qu’on ne pût encore songer à lui faire manœuvrer la gaffe, — quand l’Équipage se cassait quelque chose.

Et tout allait de mal en pis. On avait eu grand’peine, au dernier voyage, à remonter la Seine jusqu’à Clamecy.

La Belle-Nivernaise faisait eau de toutes parts ; les raccords ne suffisaient plus, il aurait fallu radouber toute la coque, ou plutôt mettre la barque au rancart et la remplacer.

Un soir de mars, c’était la veille de l’appareillage pour Paris, comme Louveau tout soucieux prenait congé de Maugendre, après avoir réglé son compte de bois, le charpentier lui offrit de venir boire une bouteille dans sa maison.

— J’ai à te causer, François.