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instructifs, des livres pour l’usage externe… agiter avant de s’en servir !… Il n’y a que la légèreté française pour prendre ces compilations au sérieux. Ce que les Allemands et les Anglais nous blaguent !… Ineptissimus vir Astier-Réhu !… dit Mommsen dans une de ses notes.

— C’est même toi, gros sans-cœur, qui la fis lire au pauvre homme, cette note, et en pleine classe.

— Ah ! J’en ai eu du babouin et du bélitre, presque autant que le jour où, fatigué de l’entendre nous répéter que la volonté était un cric, qu’on parvenait à tout avec ce cric, je lui jetai de mon banc en faisant sa voix : Et les ailes, monsieur Astier, et les ailes ! »

Freydet se mit à rire, et, lâchant l’historien pour l’universitaire, il essayait de défendre Astier-Réhu comme professeur. Mais Védrine se montait encore :

« Oui, parlons-en, du professeur, un misérable dont l’existence s’est passée à détruire, à arracher dans des milliers d’intelligences la mauvaise herbe, c’est-à-dire l’original, le spontané, ces germes de vie qu’un maître doit, avant tout, entretenir et protéger… Ah ! le saligaud, nous a-t-il assez raclés, épluchés, sarclés… Il y en avait qui résistaient au fer et à la bêche, mais le vieux s’acharnait des outils et des ongles, arrivait à nous faire tous propres et plats comme un banc d’école.