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se perdait entre des murs noircis, lézardés, éclairé çà et là de larges crevasses, montrant des débris de plâtre, de fonte, d’inextricables broussailles. À l’entrée de ce couloir la muraille portait : Corridor des huissiers. Ils le retrouvèrent à peu près semblable à l’étage au-dessus, seulement, ici, la toiture ayant cédé, ce n’était plus qu’une longue terrasse de broussailles montant aux arcades restées debout et retombant en lianes échevelées et battantes jusqu’au niveau de la cour d’honneur. Et l’on apercevait de là-haut les toits des maisons voisines, les murs blancs de la caserne rue de Poitiers, les grands platanes de l’hôtel Padovani balançant à leur cime des nids de corneilles, abandonnés et vides jusqu’à l’hiver, puis, en bas, la cour déserte, pleine de soleil, le petit jardin du relieur et son étroite maisonnette.

« Dis donc, mon vieux, y en a-t-il ! y en a-t-il !… disait Védrine montrant à son camarade la flore sauvage, d’une exubérance, d’une variété si extraordinaires, dont le palais entier était envahi… si Crocodilus voyait ça, quelle colère ! » Tout à coup se reculant : « C’est trop fort, par exemple… »

En bas, vers la maison du relieur, venait d’apparaître Astier-Réhu reconnaissable à sa longue redingote vert serpent, à son haute-forme élargi et plat ; célèbre sur la rive gauche, ce chapeau