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paperasser, d’ouvrir, de fermer des cartons verts à l’odeur fade et moisie, de se sentir un des rouages de cette machine de Marly, auguste et compliquée, encombrante et décrépite, qu’on nomme l’administration française… Lorie-Dufresne en fut tout rajeuni.

Et quel repos, après la fatigue des affaires, de monter le soir avec Fanny chez les Ebsen, dans ce salon modeste où des meubles lourds et surannés, la console Empire venue de Copenhague, et l’horloge électrique qui n’avait jamais marché, cause de tous leurs malheurs, contrastaient avec un joli siège du tapissier en renom, une jardinière en cloisonné, des cadeaux d’élèves riches. Sur tout cela les dentelles de la vieille dame, en nappes, en tapis, en jetés de fauteuil, répandaient une blancheur passée de mode, un calme pour le regard charmé déjà par ces trois âges de femme, grand’mère, fille et petite-fille, si dignement, si joliment représentés.

Pendant qu’Éline installait la petite Fanny et ses livres, Lorie causait avec Mme Ebsen, l’entretenait de ses jours de puissance, de ses succès défunts, comme il sied à toutes les majestés