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Puis l’impression produite, au risque de tuer la mère, en route !…

*

C’était trop, à la fin.

« Eh ! bien, va… je n’ai plus d’enfant… »

Elle dit cela sourdement, d’une voix terrible. Après, les deux femmes restèrent droites, sans un mot, sans un regard, attendant la voiture qu’on était allé chercher…

Ce fut long, ce fut rapide, incommensurable comme la minute où l’on meurt.

« Adieu, ma mère… je t’écrirai… » dit Lina.

L’autre répondit seulement : « Adieu… »

Machinalement leurs joues se frôlèrent, un baiser glissant et froid comme la dalle d’un temple. Mais en ce court contact, la chair s’émut, cria, et tout au fond d’Éline, dans ce qui restait de son enfant, la mère entendit le soulèvement avorté d’un sanglot.

« Reste alors !… »

Et elle lui tendait ses bras tout grands. Mais Éline, égarée, la voix rauque :

« Non, non, pour ton salut, pour le mien… je, te sauve en nous déchirant… »

… Mme Ebsen, immobile à la même place, entend ce pas léger qui s’éloigne sur l’escalier.