Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/311

Cette page n’a pas encore été corrigée

mère écrivait : « Mon enfant chérie, où es-tu ! que fais-tu ? moi, je pense à toi et je pleure… Hier c’était le Jour des morts ; je suis allée là-bas et j’ai fait sur la tombe de grand’mère un petit bouquet que je t’envoie… »

L’enfant répondait : « Je te remercie de ton souvenir ; mais il m’est encore plus doux de posséder un Sauveur vivant pour l’éternité que ces fleurs misérables. C’est auprès de ce Dieu, chère mère, que je désire ardemment que tu trouves le pardon, la paix et la consolation qu’il te veut si gratuitement dispenser… »

Et malgré tout, c’était, ces lettres désolantes et glacées, ce que la mère avait de meilleur ; elle n’essuyait ses larmes que pour les lire, et trouvait dans leur attente, dans le premier espoir de l’enveloppe ouverte en tremblant, le courage de vivre encore, de résister aux résolutions suprêmes, aux coups de tête que le bon M. Birk redoutait tant pour sa « pauvre amie », comme d’aller attendre la voiture de Mme Autheman à sa porte, s’accrocher après, crier sous les roues : « Mon enfant ?… où est mon enfant ? » ou bien de partir pour Londres, Bâle, Zurich, faire son enquête elle-même, ainsi