Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/264

Cette page n’a pas encore été corrigée

du flot en écume au long des vannes, et là-bas, dans l’embrasure de la porte, une petite blondine en sarrau de paysanne, qui la regarde et tout à coup se sauve en appelant avec la voix de Fanny :

« Sylvanire, elle est réveillée… »

Et les voilà toutes deux, Sylvanire et Fanny, installées à son chevet ; et cela ranime la pauvre mère, cette loyale figure en face d’elle, ces cheveux d’enfant en soie chaude contre sa joue. Mais, mon Dieu, qu’est-ce qu’il y a donc ? Comment est-elle ici ?… Sylvanire n’en sait guère plus qu’elle là-dessus. Hier, en rentrant du catéchisme, Maurice a trouvé Mme Ebsen comme morte sur le chemin de halage. « Un coup de sang… qu’a dit le médecin d’Ablon ; même qu’il a dû la saigner deux fois, et de la manière que le sang giclait, il a vu tout de suite qu’il n’en serai que ça. » Malgré tout, Sylvanire a télégraphié bien vite à Mlle Éline… C’est commode au barrage, on a le télégraphe dans la maison.

La femme de Romain s’arrête interdite en voyant Mme Ebsen qui sanglote et se cache dans les oreillers, plus blanche que leur toile. Le nom d’Éline a réveillé son désespoir, tout à coup redressé et fort,