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joies sans durée pour celle qui ne s’épanouit qu’au ciel. Quelquefois on s’arrêtait, on entrait dans une église. Éline n’y mettait aucun scrupule, les temples protestants restant fermés en semaine, et tout lieu de prière gardant l’atmosphère de mysticité où se plaisent les âmes religieuses. Dans Sainte-Clotilde déserte, elle était encore mieux pour se recueillir et s’interroger devant Dieu, que le dimanche au culte officiel et mondain de la rue Chauchat.

C’est une des surprises de Paris, que ce temple scandinave en plein quartier Montmartre, à deux pas de l’Hôtel-des-Ventes. En quittant le boulevard des Italiens, rien n’est plus saisissant que de se trouver tout à coup dans ce jour froid tombant d’une voûte en arceaux à demi vitrée, devant ce pasteur en long mantelet noir prêchant dans un dialecte dur, guttural, qui roule en quartiers de roche, rebondit sur des bancs de bois massifs où s’inclinent des nuques blanches à lourdes nattes fauves, de solides carrures d’hommes, toute la colonie danoise, norvégienne, suédoise, – teints chauds, regards clairs, barbe de dieux du Nord, – qui a ses noms inscrits sur le « livre des Scandinaves » au café