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premier avertissement du Père, la punition d’avoir livré tout ton cœur aux affections terrestres, car il est écrit : N’aimez point. Et, si ce premier avis ne suffit pas, le Père t’avertira encore, il te prendra ton mari, les deux enfants qui te restent, il te frappera sans relâche jusqu’à ce que tu aies compris. »

Watson demanda : « Que dois je faire ?

– Renoncer au monde et travailler pour le divin maître. Il y a des milliers d’âmes abandonnées par ignorance au démon. Va les délivrer, apporte-leur le salut de l’Évangile. La vie des tiens est à ce prix.

– Je pars… » dit Watson ; et profitant d’une absence de son mari – gardien-chef au phare de Cardiff et de service la moitié du mois, – elle quitta sa maison, une nuit, pendant que les petits dormaient. Oh ! cette nuit du départ, cette dernière veille auprès des deux couchettes que berçait un même souffle innocent et égal, le cramponnement désespéré à ces petites mains, à ces petits bras jetés dans l’abandon du sommeil et la grâce caressante de l’enfance… Quels adieux ! Que de larmes ! Elles coulaient encore, de souvenir, le long de ce pauvre visage,