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pour une minute à l’éclusier, debout tout flambant sur le quai de la gare, l’assourdissante ivresse de la popularité.

« Eh ! bon Dieu, qu’est-ce qu’ils ont donc après toi, mon pauvre homme ? » fit Sylvanire épouvantée, sautant du wagon la première, la petite Fanny dans ses bras.

« Ils sont contents, ils s’amusent…, mais, cré cochon !… j’ai encore plus d’agrément qu’eux. »

Et se hissant jusqu’aux joues vermeilles de sa femme, il les fit claquer d’un gros baiser qui redoubla les rires aux portières ; puis il s’élança pour donner la main à Mme Ebsen et à sa fille, mais, Lorie qui était dans le wagon, l’avait déjà prévenu et faisait descendre ces dames du geste respectueusement anéanti dont il recevait jadis l’impératrice Eugénie débarquant sur le quai de Cherchell.

« Et Maurice ?… » demanda Fanny cherchant son frère aux côtés de Romain.

« M. Maurice est à l’écluse, mamzelle. Je l’ai laissé avec Baraquin pour aider à la manœuvre… Par ici la sortie, monsieur, mesdames… »

Chargé des manteaux, des parapluies de tout le monde, d’un petit pas alerte et serré où l’on