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au temple : des protestations et des promesses froides comme la bise d’hiver qui soufflait par ces premiers jours de septembre avec un goût de neige, âpre à respirer.

Ils jurèrent d’être l’un à l’autre, de s’employer à répandre l’Évangile, la gloire et la parole du vrai Dieu, pendant que les pierres de la moraine s’ébranlaient, roulaient sous leurs pieds, ternissant de leur grise poussière les cristaux bleus du glacier. Il étudierait encore un an avant d’être pasteur ; elle, pendant ce temps, travaillerait à s’armer pour la mission sainte, ils s’écriraient toutes les semaines. Et ceci convenu et promis, la main dans la main, ils restèrent serrés l’un contre l’autre sans parler, le Genevois plus rassis que sa compagne, relevant son collet parce qu’il grelottait, elle brûlant d’une fièvre de prosélyte, la joue de ce même rose ardent que le soleil couché jetait encore sur les cimes solides et givrées de la Jungfrau.

On s’écrivit donc tout un an, amour et théologie mêlés, la correspondance d’Héloïse et de son maître, corrigée, réfrigérée par le protestantisme ; et comme Jeanne voulait très sérieusement se consacrer à sa mission, elle alla étudier l’anglais