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plus… » À la fin il se dit : « J’aime mieux lui parler… » Et pour se donner du temps, pour se préparer à cette pénible entrevue, il remit la visite de Jack de huit jours, avec cette vague espérance que Cécile changerait peut-être d’avis dans la semaine.

Il ne fut plus question de rien entre eux pendant ces huit jours. Mais, le samedi suivant, quand M. Rivals dit à sa petite-fille :

— Il viendra demain. Tu es toujours dans les mêmes idées ? Ta décision est irrévocable ?

— Irrévocable !… répondit-elle fermement, en laissant tomber l’une après l’autre, et de tout leur poids, les syllabes de ce mot anti-humain.

Jack arriva le dimanche de bonne heure, selon son habitude, et ne fit qu’un bond de la gare d’Évry à Étiolles. Son émotion était grande en franchissant le seuil, un seuil ami pourtant, et qui aurait dû le rassurer de tous ses bons accueils d’autrefois.

— Monsieur vous attend dans le jardin, lui dit la servante en venant lui ouvrir.

Et tout de suite, il eut froid au cœur, devina quelque désastre. La figure bouleversée du bon docteur acheva de l’épouvanter. Celui-ci, que quarante ans de stations anxieuses au chevet des malades avaient cependant aguerri au spectacle des souffrances humaines, était aussi tremblant, aussi troublé que Jack.

— Cécile n’est pas là ?…

Ce fut le premier mot du pauvre garçon.