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lours. Dans ce trouble qui précède le sommeil assis, fatigant et désagréable, il entendait chuchoter les trois voix des domestiques… Maintenant il lui semblait qu’on parlait de lui ; mais c’était loin, bien loin, dans le brouillard.

— À qui qu’il est donc, ce chéri ? demanda la voix de la cuisinière.

— Je n’en sais rien, répondait Constant, mais ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il ne peut pas rester ici et qu’elle m’a chargée de lui trouver un pensionnat.

Entre deux hoquets, le cocher bégaya :

— Attendez donc, attendez donc. J’en connais un fameux, moi, de pensionnat, et qui ferait joliment votre af… votre affaire. Ça s’appelle le collége… non, pas le collége… le gy… le gymnase Moronval. Mais, quoique ça, c’est tout de même un collége. Quand j’étais chez les Saïd, chez mes Égyptiens, c’est là que je conduisais le petit ; même que le marchand de soupe, une espèce de malblanchi, me donnait toujours des prospectus. Je dois en avoir encore un…

Il chercha dans son portefeuille, et parmi les paperasses fanées qu’il étala sur la table, il en saisit une, plus crasseuse encore que les autres.

— Voilà ! dit-il d’un air de triomphe.

Il déplia le prospectus, et commença à lire, ou plutôt à épeler péniblement :

« Gy… Gymnase… Moronval… dans le… le…

— Donnez-moi ça, dit mademoiselle Constant, et,