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Elle sera encore plus jolie que sa mère… Pourvu qu’il ne lui en arrive pas autant. »

La quête finie, Jack, revenu à sa place, croyait sentir encore le charme communicatif de la petite main si légèrement tenue ; mais son bonheur ne devait pas finir là. À la sortie, dans l’encombrement de la petite place, où les casques des pompiers, les fusils des forestiers, brillaient au soleil parmi le bariolage des toilettes, madame Rivals s’approcha de d’Argenton et demanda la permission d’emmener Jack déjeuner chez elle et de le garder tout l’après-midi pour jouer avec sa quêteuse. Charlotte rougit de plaisir, renoua la cravate de l’enfant, fit bouffer ses beaux cheveux, l’embrassa :

— Sois gentil !…

Et les deux petits, comme dans la marche solennelle de la quête, s’en allèrent ensemble devant la grand’maman, qui avait peine à les suivre.

À partir de ce jour-là, quand Jack n’était plus à la maison et qu’on demandait : « Où est-il ? » on ne répondait plus : « Il est en forêt » mais on pouvait dire à coup sûr : « Il est chez les Rivals. »

Le médecin habitait tout au bout du pays, du côté opposé aux Aulnettes, une maison à un étage assez semblable à celle des paysans, et qu’une plaque de cuivre, un bouton posé près de la porte avec ces mots : « sonnette de nuit » distinguaient seuls de ses voisines. Elle paraissait ancienne, avait des murs noircis,