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l’adresse et le nom des bonnes faiseuses. Sidonie ne dit pas non plus que ces amies de Claire dont elle parle si dédaigneusement, elle les a toutes suppliées de venir la voir, son jour, et que ce jour a été choisi par elles-mêmes.

Viendront-elles ? Madame Fromont jeune fera-t-elle à madame Risler aîné l’affront de manquer son premier vendredi ? Cela l’inquiète jusqu’à la fièvre…

– Mais dépêchez-vous donc, dit Sidonie à chaque instant… comme vous êtes long à déjeuner, bon Dieu !

Le fait est qu’une des manies du brave Risler est de manger lentement, d’allumer sa pipe à table en savourant son café à petites doses. Aujourd’hui il lui faut renoncer à ces chères habitudes, laisser la pipe dans son étui à cause de la fumée, et sitôt la dernière bouchée aller s’habiller bien vite, car sa femme tient à ce qu’il monte, cette après-midi, saluer ces dames.

Quel événement dans la fabrique quand on voit Risler aîné descendre, un jour de semaine, en redingote noire et cravate de cérémonie !

– Tu vas donc à la noce ? lui crie le caissier Sigismond derrière son grillage.

Et Risler répond, non sans quelque fierté :

– C’est le jour de ma femme !

Bientôt tout le monde sait dans la maison que c’est le jour de Sidonie ; et même le père Achille, qui fait le jardin, n’est pas très content parce qu’on a cassé des branches aux lauriers d’hiver de l’entrée.

Assis devant la planche où il dessine, sous le jour