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commença par parler de la pièce… Il aimait bien ces comédies où il y avait du sentiment.

– Et vous, Sidonie ?

– Oh ! moi, vous savez, Frantz, pourvu qu’il y ait des toilettes.

Le fait est qu’au théâtre elle ne s’occupait pas d’autre chose. Ce n’était pas une de ces sentimentales à la Bovary qui reviennent du spectacle avec des phrases d’amour toutes faites, un idéal de convention. Non ! Le théâtre lui donnait seulement des envies folles de luxe, d’élégance ; elle n’en rapportait que des modèles de coiffure et des patrons de robes… Les toilettes nouvelles, exagérées, des actrices, leur démarche, jusqu’à leurs intonations faussement mondaines qui lui semblaient la distinction suprême, avec cela l’éblouissement banal des dorures, des lumières, l’affiche étincelante à la porte, les voitures arrêtées, tout ce bruit un peu malsain qui se fait autour d’une pièce en vogue : voilà ce qu’elle aimait, ce qui la prenait. L’amoureux continua :

– Comme ils ont bien joué leur scène d’amour ! Et en disant ce mot d’amour il se penchait tendrement vers une jolie petite tête entourée d’un capuchon en laine blanche d’où les cheveux s’échappaient en frisottant. Sidonie soupira :

– Oh ! oui, la scène d’amour… L’actrice avait de bien beaux diamants !

Il y eut un moment de silence. Le pauvre Frantz avait beaucoup de peine à s’expliquer. Les mots qu’il cherchait