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– Risler, Risler…, où allez-vous ?

Elle croyait qu’il montait chez Georges. Risler la comprit et eut un sourire superbe de dédain :

– Rassurez-vous, madame… Monsieur Georges peut dormir tranquille… J’ai quelque chose de plus pressé à faire que de venger mon honneur de mari. Attendez-moi là… je reviens.

Il s’élança dans le petit escalier ; et, confiante en sa parole, Claire resta en face de Planus dans une de ces minutes suprêmes et indécises qui semblent longues de toutes les suppositions qui les traversent. Quelques instants après, un bruit de pas pressés, un froissement d’étoffes emplit l’escalier étroit et sombre.

Sidonie parut la première, en tenue de bal, splendide et si pâle que ses bijoux ruisselant partout sur sa peau mate semblaient plus vivants qu’elle-même, semés sur le marbre froid d’une statue. L’essoufflement de la danse, le tremblement de l’émotion et de sa course rapide la secouaient encore tout entière, et ses rubans légers, ses volants, ses fleurs, sa riche parure mondaine s’affaissaient autour d’elle, tragiquement. Risler la suivait, chargé d’écrins, de coffrets, de papiers. En arrivant là-haut, il s’était rué sur le secrétaire de sa femme, avait pris tout ce qu’il contenait de précieux, bijoux, titres de rente, acte de vente de la maison d’Asnières ; puis, du seuil de la chambre, il l’avait appelée dans le bal à voix haute :

– Madame Risler !…

Elle était accourue bien vite sans que rien de cette