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n’allaient pas. Rien ne marchait, ni les draps, ni les tissus, rien. C’est à ce moment de nouvelle crise que mademoiselle Planus, ma sœur, fit sa visite à propos de Sidonie. La vieille fille s’était dit en route : « Prenons des ménagements… » Mais, comme tous les gens timides, elle se débarrassa de son fardeau, dès en entrant, aux premiers mots.

Ce fut un coup de théâtre. En entendant qu’on accusait sa fille, madame Chèbe se leva, tout indignée. Jamais on ne lui ferait croire une chose pareille. Sa pauvre Sidonie était victime d’une infâme calomnie.

M. Chèbe, lui, le prit de très haut, avec des phrases, des airs de tête, rapportant tout à sa personne, selon son habitude. Comment pouvait-on supposer que son enfant à lui, une demoiselle Chèbe, fille d’un honorable commerçant connu depuis trente ans sur la place, fût capable de… Allons donc !

Mademoiselle Planus insista. Il lui en coûtait de passer pour une bavarde, une colporteuse de mauvaises nouvelles. Mais on avait des preuves certaines. Ce n’était plus un secret pour personne.

– Et quand cela serait, s’écria M. Chèbe furieux de cette insistance… Est-ce à nous de nous en préoccuper ? Notre fille est mariée. Elle vit loin de ses parents… C’est à son mari, beaucoup plus âgé qu’elle, à la conseiller, à la conduire… Y a-t-il songé seulement ?

Sur ce, le petit homme se mit à déblatérer contre son gendre, ce Suisse au sang lourd qui passait sa vie dans son bureau à chercher des mécaniques, refusait