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L’ILLUSTRE DOCTEUR-PROFESSEUR OTTO DE SCHWANTHALER


Ce fut un événement dans Munich. On n’y avait pas encore vu de pendule de Bougival, et chacun venait regarder celle-là aussi curieusement que les coquilles japonaises du musée de Siebold. Devant le magasin d’Augustus Cahn, trois rangs de grosses pipes fumaient du matin au soir, et le bon populaire de Munich se demandait avec des yeux ronds et des Mein Gott de stupéfaction à quoi pouvait servir cette singulière petite machine. Les journaux illustrés donnèrent sa reproduction. Ses photographies s’étalèrent dans toutes les vitrines ; et c’est en son honneur que l’illustre docteur-professeur Otto de Schwanthaler composa son fameux Paradoxe sur les pendules, étude philosophico-humoristique en six cents pages, où il est traité de l’influence des pendules sur la vie des peuples et logiquement démontré qu’une nation assez folle pour régler l’emploi de son temps sur des chronomètres aussi détraqués que cette petite pendule de Bougival devait s’attendre à toutes les catastrophes, ainsi