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père ; mais, en levant les yeux, il rencontre toujours un regard inexorable.

Enfin le forgeron se décide à parler.

« Garçon, dit-il, voilà l’enclume, les outils… tout cela est à toi… Et tout cela aussi ! » ajoute-t-il, en lui montrant le petit jardin qui s’ouvre là-bas au fond, plein de soleil et d’abeilles, dans le cadre enfumé de la porte… « Les ruches, la vigne, la maison, tout t’appartient… Puisque tu as sacrifié ton honneur à ces choses, c’est bien le moins que tu les gardes… Te voilà maître ici… Moi, je pars… Tu dois cinq ans à la France, je vais les payer pour toi.

— Lory, Lory, où vas-tu ? crie la pauvre vieille.

— Père !… » supplie l’enfant… Mais le forgeron est déjà parti, marchant à grands pas, sans se retourner…

À Sidi-bel-Abbès, au dépôt du 3e zouaves, il y a depuis quelques jours un engagé volontaire de cinquante-cinq ans.

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